La Culture est la solution

Aadel Essaadani
Acteur culturel, il a été à l’origine de nombreux événements et festivals.

«La modernité c’est l’asphalte, la civilisation c’est le passage piéton», une maxime potentiellement utile, chaque jour, dans notre cher et heureux pays. Un test que nous pourrions appliquer pour nous questionner constamment si nous sommes civilisés, pas encore ou pas tout à fait, au-delà de la modernité apparente dans laquelle nous vivons. L’introduction est rude, mais la vérité nous impose de reconnaître que même si nous avons les autoroutes, les usines, internet et le téléphone qui marchent à peu près partout, le TGV, le tramway, et même des lois et deux chambres au Parlement, ça ne tourne pas tout à fait rond dans le plus beau pays du monde.

Modernité et civilisation
D’autres variantes de cette maxime peuvent également être déclinées à l’infini. La modernité c’est avoir un code de la route, la civilisation c’est respecter le feu rouge. La modernité c’est avoir des boulangeries dernier cri, la civilisation c’est respecter la queue pour y acheter sa baguette. Au-delà du quotidien, la même maxime pourrait comprendre d’autres situations et concepts aussi nombreux que variés : égalité des chances, parité homme-femme, service public (éducation, santé), équité économique…
Nous pouvons affirmer que nous le sommes, modernes, puisque nous avons internet, l’électricité, l’eau courante et le tout-à-l’égout ! L’anthropologue Bruno Latour définissait la modernité par la capacité de ses contemporains occidentaux à concilier nature et culture, ancien et nouveau. Nous pourrions appliquer cela au contexte marocain, en faisant la distinction, par exemple, entre l’usage généralisé d’internet et notre aptitude à garder un esprit critique contre toute influence.
Pour définir simplement ce que veut dire modernité et de quelle civilisation parlons-nous, disons que la modernité, ce sont les infrastructures, la civilisation c’est comment les utiliser. Elle n’est rien d’autre que le mode opératoire de cette modernité.

Devenir civilisés par la culture
Alors, comment faire pour que nous passions de modernes à civilisés ? Nous avons essayé des solutions. À chaque fois appelées différemment : plans, visions, stratégies…, nous avons créé des commissions, des conseils, des comités, des délégations, des tables rondes, des sous-commissions… Nous avons essayé des solutions économiques, politiques, sociales… Rien n’y fait, sans vouloir chercher la perfection, il y a toujours cette fâcheuse sensation qu’il manque quelque chose. Et si cette chose s’appelait culture ? Et si c’est, justement, la culture qui ferait que le Marocain respecte le feu rouge et traverse la rue au passage piéton ? Et si c’est cette culture qui guiderait la main de l’homme vers la poubelle pour jeter un emballage de biscuit, au lieu de le jeter par terre. Appelons-la comme on veut : culture, action culturelle, éducation populaire, citoyenneté, urbanité, auto-régulation, classe… Car il ne s’agit pas (que) de la culture esthétique ou d’érudition mais aussi et surtout de celle qui nourrit l’esprit critique et engendre le civisme.
Cette culture-là se construit par des politiques publiques. Par la proximité des infrastructures (maisons de culture, maisons de jeunes…) et un ministère de la Culture ayant une politique qui tend vers l’édification du citoyen et de la société. Et qui défend la créativité, la liberté d’expression, le débat public, des programmes d’éducation populaire à la télé et à la radio publiques. Nous n’y échapperons pas, sans ce travail nous persisterons à n’arriver nulle part. C’est pour cette raison que cette chronique finira dorénavant avec le même leitmotiv : la Culture est la Solution.

About FMadmin6894

Check Also

Le Maroc prend part à la Semaine verte internationale de Berlin

A cette occasion, Sadiki a inauguré vendredi le pavillon marocain à la Semaine verte internationale …

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *